Pour celles (et ceux ?) qui suivent un peu les blogues féminins, vous connaissez déjà la tendance du « no-bra » ou l’arrêt du port du soutien-gorge. Des blogueuses ayant une grande audience comme Josiane de Ton Petit Look ou Élodie de Éléonore Bridge ont même abordé le sujet en expliquant comment elles en étaient venues à ne plus en porter.
J’étais admirative de leur démarche qui leur permet de mettre des robes dos-nu ou des petits hauts avec de fines bretelles avec élégance, mais je me disais que c’était une idée inatteignable pour moi avec mon 38/100 C. Après tout, la majorité des fabricants de soutiens-gorge triangles (comme princesse Tam-Tam) arrêtent ces modèles légers à la taille 95 B. Les poitrines plus généreuses auraient besoin d’un meilleur soutien et cela rime bien souvent avec baleines : autour des seins et sur les côtés.
Bien que je rêvais de plus de liberté, je n’avais pas de problème particulier avec les soutiens-gorge, car je tombe pile-poil sur les mensurations du 100 C. Du coup, j’en possède une vingtaine de toutes les couleurs et de tous les styles. J’accommodais mon désir de me sentir moins restreinte en achetant des bonnets souples sans rembourrage que je trouve souvent chez C & A. Par contre, je m’interdisais tous les vêtements qui ne permettaient pas le port du soutien-gorge parce qu’il m’était impensable de sortir sans.

Comment j’ai décidé d’arrêter de porter des soutiens-gorge
Quand j’ai débuté mes problèmes avec mon bras droit, j’ai également commencé à sentir une gêne sur l’omoplate du même côté. Je ne m’en suis pas tellement inquiétée parce que je croyais que c’était dû à ma peau qui se veut très sensible aux frottements. Comme l’inconfort se manifestait plutôt le soir, j’enlevais tout simplement ce sous-vêtement après être rentrée du bureau.
Et puis, arriva le mois de janvier avec cette terrible « crise » du syndrome du défilé thoracobrachial. La douleur partait du creux de l’aisselle, soit à peu près où tombent les baleines des soutiens-gorge. Mon corps affecté par ce problème avait formé comme une sorte de garrot autour de mon épaule et tout le sang qui ne pouvait pas circuler dans le bras (la moitié du flux !) s’accumulait à la jonction du torse. En plus de souffrir au moindre contact avec cette région de mon corps, j’enflais beaucoup. J’ai complètement arrêté de porter des soutiens-gorge à la maison histoire de ne pas entraver encore plus la circulation sanguine.
Un bon matin, alors que je devais me rendre à un énième examen médical, j’ai essayé de m’habiller. Les agrafes ne voulaient plus se fermer, même à la position la plus grande. J’ai tiré — je n’allais quand même pas sortir sans soutien-gorge — jusqu’à ce que je réussisse à l’attacher. Trop serrée, j’avais mal et, surtout, je paraissais ridicule avec un œdème qui débordait. J’ai essayé de mettre mes brassières de sport, mais ce n’était guère mieux.
N’ayant pas envie de me retarder pour une futile question de vêtements, j’ai décidé de partir sans soutien-gorge. Toujours d’un naturel pudique, j’ai enfilé une camisole (débardeur) sous ma chemise sachant que le médecin me demanderait certainement de l’enlever.
L’enflure a pris pas mal de temps à se résorber, j’ai donc continué à sortir sans soutien-gorge pendant toute la période de mon arrêt maladie. Pour la reprise du travail, je me voyais mal transgresser la norme sociale en me présentant sans soutien-gorge/brassière. J’ai essayé tous ceux de ma collection pour choisir ceux qui dégageaient bien les omoplates et dont les armatures ne montaient pas trop haut.
Pendant quelques jours, ça allait, mais très vite cet inconfort dû aux soutiens-gorge qui contraignent le thorax a commencé à m’embêter. Je me suis enfermée aux toilettes pour l’enlever et le glisser discrètement dans l’un de mes tiroirs.


Bien décidée à rester professionnelle, après cette journée de travail, j’ai filé chez C & A. J’ai choisi ce magasin parce qu’ils vendent tous types de soutiens-gorge et qu’ils proposent des longueurs de bandes allant jusqu’au 110. J’ai essayé une bonne dizaine de modèles dans des tailles différentes. Je croyais, à tort, qu’une bande plus longue m’aiderait à me sentir moins serrée, mais malheureusement ça changeait aussi l’espacement entre les seins et donc les 105 ne m’allaient pas du tout.




Je suis finalement sortie du magasin avec une brassière sans couture et un soutien-gorge mémérisant sans armatures qui ne me faisait pas mal. Pendant quelques semaines, je les ai bien supportés, mais j’ai malheureusement recommencé à enfler sous le bras.
Un jour, j’en ai eu marre de cette gêne qui me suivait tout le temps, et ce peu importe ma position. J’ai décidé d’enlever mon soutien-gorge aux toilettes pour en finir une fois pour toutes. Pour le ramener à mon bureau discrètement, je l’ai plié et caché sous ma chemise. En passant à côté de la machine à café, il est tombé devant tout le monde. Heureusement, il n’y avait que des femmes ! J’ai expliqué rapidement qu’il me faisait mal et qu’il m’empêchait de me concentrer sur mon travail. Comme vous pouvez vous en douter, personne n’était choqué surtout que je suis loin d’être la seule à rencontrer un problème d’inconfort dû aux sous-vêtements.
Depuis ce jour, je ne porte plus de soutien-gorge, finito, sauf pour le sport. Quand j’ai raconté ça à ma mère, elle m’a demandé incrédule si j’avais aussi arrêté d’en mettre au travail : « oui, maman. De toute façon, il y a des choses bien pires que ne pas porter de soutien-gorge ! » C’est vrai, dans le fond, il me semble qu’il vaut mieux transgresser une norme sociale que de souffrir, surtout si c’est une souffrance qui peut me mener à un autre arrêt de travail.
Pour me conforter dans cette décision, j’ai lu dans Anti-Cancer : les gestes quotidiens pour la santé du corps et de l’esprit de David Servan Schreiber une citation qui m’a marquée :
Rudolf Virchow, fondateur de la pathologie moderne — la science qui étudie les rapports entre la maladie et les événements qui affectent les tissus —, était un grand médecin allemand. En 1863, il avait observé que plusieurs patients semblaient avoir développé un cancer à l’endroit précis où ils avaient reçu un coup, ou bien là où une chaussure, un outil de travail, frottait de façon répétée. Au microscope, il avait remarqué la présence de nombreuses cellules blanches au sein des tumeurs cancéreuses. Il avait alors émis l’hypothèse que le cancer était une tentative de réparation d’une blessure qui avait mal tourné.
Même si les études contemporaines n’ont pas pu établir de lien entre le port de soutiens-gorge et le cancer du sein, je ne peux pas m’empêcher de penser que le frottement des armatures et la constriction autour de la cage thoracique ne sont pas les choses les plus saines qu’il soit pour la poitrine. D’ailleurs, c’est pour cette raison qu’il ne faut pas porter de soutien-gorge ou de brassière la nuit, car ce vêtement serré autour du thorax limite la circulation lymphatique.
Au bureau et en ville sans soutien-gorge
Ne plus en mettre a grandement diminué mes douleurs dues au Syndrome du défilé thoracobrachial. Je sens mon dos plus libre et ça aide à dégonfler l’enflure autour de l’aisselle. Ça me permet également d’adopter une meilleure position des épaules. L’effet est tel que j’ai diminué ma consommation d’antidouleurs d’un tiers. Comme quoi parfois prendre une décision anormale permet de se sentir normale!

Quand je portais encore des soutiens-gorge tous les jours, je croyais que si je n’en mettais pas ma poitrine allait trop ballotter et que ma silhouette serait alourdie par des seins que j’aurais aimés plus hauts, plus ronds, plus fermes. Finalement, je trouve que ça ne paraît pas tellement lorsque je laisse ma poitrine libre. Je n’ai même pas encore reçu de regards inappropriés ou de commentaires désobligeants.
Malgré mes appréhensions, je n’ai pas de soucis pour courir après le métro ou descendre des escaliers à toute vitesse. J’ai l’impression que grâce à cette liberté mes seins se raffermissent, peut-être parce que les soutiens-gorge avec leur action semblable aux orthèses empêchaient les muscles pectoraux et ligaments de travailler (cela a été observé dans une étude).
Si je peux maintenant porter des dos nus avec confiance, je dois par contre faire plus attention à la transparence et aux vêtements qui bâillent afin de penser à mettre un débardeur en dessous. Au travail, mes chemisiers sont souvent translucides et beaucoup ont trop d’espace entre deux boutons, ainsi pour ne pas me faire remarquée j’ai acheté des débardeurs en coton chez Kiabi. À deux euros pièce, j’en ai pris plusieurs et ça coûte beaucoup moins cher que des soutifs ! Par contre, j’ai essayé des débardeurs gainant de chez Uniqlo, mais ça reste aussi douloureux qu’un soutien-gorge. Sinon pour le sport ou quand j’en ai besoin, je porte une brassière ou une bralette (j’en trouve chez H & M).
En conclusion, on transgresse une règle non écrite en ne mettant pas de soutien-gorge, mais je ne vois pas pourquoi on devrait s’imposer d’en porter si ça ne nous convient pas : c’est un crime sans victime. Oui, parfois on peut apercevoir un mamelon qui pointe, mais je refuse de me sentir honteuse pour une réaction physiologique que je ne peux pas contrôler. J’espère un jour pouvoir en remettre ma lingerie une fois de temps en temps sans que ça fasse mal parce que j’ai tout de même une belle collection de sous-vêtements bien ajustée à ma morphologie. Au pire, il me restera toujours les culottes. 😉

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