Leçons Montréalaises pour une expatriée

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Coucher de Soleil à Saint-Léonard

Au mois d’avril dernier, je montais en urgence dans un avion en direction de Montréal pour me rendre au chevet de mon grand-papa qui allait décéder quelques jours après. Dix jours de tristesse entrelacés avec le bonheur de partager du temps avec ceux que j’aime. Et surtout beaucoup de temps passé à réfléchir sur ma vie d’expatriée québécoise vivant en France.

A mon arrivée, la première chose qui m’a frappée fut le temps. Le temps qui continue de filer à Montréal sans m’attendre. Si je sais que les lois de l’espace-temps ne changent pas parce que j’habite sur un autre continent, c’est difficile d’accepter combien les personnes que j’aime peuvent changer en mon absence. Par exemple, la dernière fois que j’avais vu mon grand-papa il était en forme pour son âge et il passait ses journées à entretenir son immense terrain; au mois d’avril dernier, il avait de la difficulté à boire de l’eau tout seul. Il m’a fallu rattraper deux ans en quelques jours.

Personne n’est éternel, il faut profiter de chaque moment avec ceux qu’on aime, on aura peut-être pas de deuxième chance.

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Je me suis aussi rendue compte de l’importance de faire des photos des gens qu’on aime même dans les moments banals de la vie. Quand il a fallu décider d’une photo de mon grand-père pour le salon funéraire, j’avais dans mes archives une photo de lui assis au coin d’une table après un repas de famille. Une belle photo avec ses yeux verts pétillants et sa bonhomie rayonnante.

Une photo qui a fait plaisir à ma mère et ma grand-mère qui ne savaient pas où se tourner mais aussi une photo que je n’aurais plus l’occasion de prendre et que je suis tellement heureuse d’avoir.

Sans vouloir être fataliste, peut-être que la prochaine fois que je retournerai à Montréal d’autres personnes auront disparues. Au moins, j’aurais des souvenirs du dernier bon moment que nous auront passé ensemble, même si ce n’était pas une grande occasion.

Donc, oui, quitte à passer pour la folle de service toujours avoir ma caméra avec moi pour prendre en photo les gens qui m’entourent et pas seulement les paysages.

Et plus brièvement:

  • On se moque souvent de moi parce que j’économise beaucoup mais j’ai été tellement contente de pouvoir payer un aller-retour Paris-Montréal sans manquer à mes obligations financières que tousmes sacrifices sont justifiés. Garder dans mon compte de banque l’équivalent d’un billet d’avion aller-retour Paris-Montréal me semble vital.
  • Savoir parfois suivre son cœur plutôt que la raison, j’ai hésité entre partir en plein milieu de la semaine ou attendre le vendredi soir pour me rendre à Montréal,ce qui était plus raisonnable vis-à-vis mon travail. Personne ne pouvait me dire combien de temps il lui restait à vivre mais j’ai senti que je devais partir tout de suite, ce que j’ai fait. Heureusement que je suis partie car j’aurai manqué de moments qui ont été très beaux malgré la situation. Finalement, à mon retour mes patron ont été compréhensifs comme quoi tout s’arrange quand on fait le bon choix.
  • Mettre mes papiers en ordre dans l’éventualité de mon décès. Ce n’est pas joyeux de penser à cela mais, la mort fait partie de la vie et déjà que ce n’est pas facile pour les survivants, c’est pire si aucune dispositions n’ont été prises. Pour le moment, un testament olographe (FR / QC) et un mandat en cas d’inaptitude (FR / QC)  gardés à la maison me semblent appropriés surtout qu’ils peuvent être préparés sans l’aide d’un avocat ou d’un notaire.

Maintenant, il ne me reste plus qu’à trouver une solution pour ne plus me sentir coupable d’avoir divisé ma vie entre deux continents.

Mangeoire qui a connu de plus beaux jours mais qui a été construite par mon grand-papa sur le modèle de sa maison

Par Cynthia

Montréalaise en escale à Paris.

40 commentaires

  1. La vie des expatriés et des immigrants n’est pas facile, ça c’est sûr. Je suis comme toi, c’est difficile d’accepter que la vie continue même quand on n’est pas là… Heureusement, ça fait bientôt 18 ans que j’ai quitté l’Europe et c’est plus facile, avec le temps, surtout que je tout n’était pas toujours rose entre ma famille et moi. Tes conseils sont très judicieux, je vais aller voir l’histoire du testament olographe 🙂

    1. C’est bien pratique si on ne souhaite pas payer le notaire par contre je ne sais pas comment ça se passe dans les provinces appliquant la common law.

  2. Joli article même si triste de par la leçon en elle-même…

    Effectivement ce n’est jamais facile de bien vivre le côté famille en étant expatriées, les yeux ne voient pas mais le coeur ressent beaucoup ! Il faut, bien souvent, être très fort.

  3. Intéressant ces petits liens de testaments olographes, je ne connaissais pas.

    Ce qui m’a fait revenir, c’est la famille. Peut-être n’ai-je plus les beaux paysages et la facilité de faire des voyages que la France me permettait, mais j’ai ma famille et amis près de moi. Je comprends aujourd’hui que c’est ce qui compte le plus à mes yeux. Pour moi, ce fût une sage décision.

  4. Billet très touchant. Je trouve ça souvent difficile de vivre à l’étranger aussi, surtout dans ces moments importants. Ma grand-mère est morte alors que j’étudiais ici en Angleterre. Je n’ai pas pu aller aux funérailles.

    1. J’ai eu de la chance parce que mon grand-père a décidé du moment de sa mort et j’ai donc eu le temps de me rendre mais j’aurais pu aussi tout manquer suffise que ça tombe à un autre moment de l’année ou que ça arrive subitement.

  5. C’est ce que je trouvais difficile quand j’étais expatriée, avoir l’impression de « perdre » du temps à ne pas voir mes proches.

  6. Ton billet est chargé d’émotions. Il m’a prise aux tripes.
    C’est l’une des choses qui me titillent l’esprit dans notre projet de retourner à Montréal. En partant, on fait le choix de laisser la famille dernière nous. Et il y aura des épreuves inévitables.
    Mais même sans être séparés sur deux continents, on ne sait jamais ce qu’il peut arriver à nos proches. Alors profitons, profitons !

    1. Je pense que profiter est important parce que même quand on habite proche on ne prend pas toujours assez de temps pour voir ceux à qui on tient.

  7. bonjour, juste un petit mot pour vous dire que ce billet est vraiment très touchant et que je partage ce point de vue sur la vie! oui malheureusement le temps passe et j’ai moi aussi besoin de prendre des photos de moments « banals » parce qu’au final ce sont ces moments là qui sont notre quotidien… on ne sait pas de quoi demain sera fait et il faut profiter de chaque instant au maximum!

  8. plus de 9000km m’ont des années séparés de ma famille… c’était dans la balance pour rentrer en France ! J’avais la chance d’avoir un mari qui m’a suivi, ce n’est toujours pas évident pour les couples bi-nationaux. Maintenant que je suis à même pas 600km de ma famille je me trouve encore trop loin, c’est l’appel de la Bretagne ! Décès, mariages, divorces, naissances… je participe pourtant à tous ces avantages et inconvénients dorénavant !

    1. J’essaie de convaincre mon conjoint retourner au Québec mais ça entraînerait une reconversion professionnelle pour lui donc du coup ça va prendre beaucoup de travail 😉

  9. Moi, je suis l’.inverse de toi puisque je suis française expatriée à Montréal. Je n’ai pas encore connu ce genre de chose et cela me fait peur. Je me souviendrais toujours de mon amie française lorsque j’étais en Australie qui n’a pas pu se payer l’aller retour Sydney paris pour aller à l’enterrement de son papa.
    Ton billet est très touchant et toutes les personnes vivant à l’étranger peuvent comprendre et ressentir ce que tu décris.

    1. Il faut en autre conscient mais aussi relativiser … j’ai beau avoir mes beaux-parents à moins de trois heures de train je ne les vois que quelques jours par année. J’aurais très bien pu habiter Ottawa et ne pas être en mesure de me rendre aussi souvent que je voudrais à Montréal!

  10. Je suis actuellement expat à Toronto, et j’avoue que j’aime ma vie ici, ayant la bougeotte, mais j’ai peur de louper des moments précieux avec ma famille… Voir mes neveux qui grandissent à une vitesse folle en ligne, mes frères et soeurs et leurs différent projet, même mes copines française qui forment des familles sans que je sois physiquement là, c’est pas facile tous les jours. Je te comprends pour garder l’argent sur son compte, je fais pareil. Je veux être capable de pouvoir partir du jour au lendemain si besoin…

    1. C’est fou avec les enfants on dirait qu’il font des bons dans le temps tellement qu’ils grandissent vite! J’ai un petit cousin que j’ai vu bébé et qui marchait/parlait déjà la dernière fois, tout un choc!

  11. Billet très touchant et que tous les expatriés comprennent. J’ai perdu mon grand-père il y a 10 jours, il est parti si vite que je n’ai pas pu renter, c’est triste mais au moins je me dis que je garde des souvenirs de lui en bonne forme. Vivre à l’étranger, c’est pas simple sur ce point.

  12. étant moi-même aussi expatriée (dans le sens inverse du tien: française à Montréal), je me retrouve complètement dans ton bel article. Ma grand-mère est décédée il y a quelques mois, et comme je venais de commencer un nouveau travail, je n’ai pas pu me rendre à l’enterrement. C’est déjà difficile d’être absent pour les petites choses du quotidien, ou pour les naissances et les mariages, mais pour les décès, c’est encore plus dur… Toutes mes condoléances pour ton grand-père.
    P.S: si tu trouves la solution pour ne plus culpabiliser d’être partie, je veux bien que tu partages!

    1. J’essaie surtout de relativiser. Si j’étais restée au Canada je serais peut-être déménagée pour le travail à Ottawa ou pire Toronto à 7hrs de voiture de Montréal.

  13. je découvre ton blog et il tombe pile poil car nous allons au québec en septembre dans l’espor que ça nous plaise pour nous y expatrier… 😀 Dommage que je commence à te lire par une triste nouvelle, courage

    1. En fait c’est triste pas si triste dans le sens que mon grand-père souhaitait mourir et qu’on a passé de beaux derniers moments ensembles 🙂

  14. Je garde ce billet dans mes favoris. Souvent on parle, on parle, mais à la fin, il y a rien d’écrit. On laisse toujours pour après et l’après, c’est souvent trop tard.
    Et cette affaire de garder sur son compte suffisamment pour un A/R, il faut que je m’en souvienne. Surtout que pour un A/R France/Angola, c’est l’équivalent d’un bon salaire… :-/

    1. C’est toujours de grosses sommes mais *touchons du bois* je garde aussi cet argent car si je me sépare de mon conjoint je retourne direct à Montréal avec mon chien … impossible de vivre sur mon salaire à Paris!

  15. Je ne vois pas pourquoi les gens se moquent de toi parce que tu économises… Enfin perso je ne dépense pas des mille et des cent en fringue ou autre, et ça me permet de commencer à avoir un bon petit pactole de côté, pour les urgences qui pourraient advenir et surtout pour voyager au long court l’année prochaine aussi. 😉

    En ce qui concerne ton grand père, je suis heureuse pour toi que tu ais eu le temps de le revoir avant la fin. Moi j’ai attendu trop longtemps, il n’allait pas bien depuis plusieurs mois et on avait prévu d’aller le voir en juillet 2011 (mes grands parents habitent au Portugal alors c’était plus simple d’attendre les vacances) et malheureusement il est parti 2 semaines avant qu’on n’arrive. Résultat, on a quand même pris la voiture en express pour faire la route en une journée et être à temps à l’enterrement.

    D’un côté, je me dis au moins que j’ai eu la chance de lui dire au revoir de cette façon et qu’il est parti avant que je ne sois plus en Europe. Si aujourd’hui il arrivait quoi que ce soit à un de mes proches en France, soit sûre que je prendrai la même décision que toi, je sauterais dans le premier avion!

  16. Très bel article émouvant et tellement vrai ! Ce n’est pas chose aisée de vivre loin de son pays natal mais parfois il le faut et lorsqu’on retourne auprès de ses proches la joie est décuplée, les retrouvailles sont pleines d’amour et de sincérité !

    Bon courage à vous 🙂

  17. C’est beau, et triste en même temps. Et je suis tout à fait d’accord avec tes conseils. Même sans être aussi éloigné de chez moi que toi (seulement 1000km), j’ai aussi un « fonds de secours ». Et on me prend pour un fou avec mon appareil, un peu, des fois. Mais quand il s’agit de choisir une photo pour un décès, on ne peut pas trop fanfaronner non plus en disant « j’vous l’avais dit »…
    Toutes mes condoléances pour ton grand-père. 🙁

  18. C’est très touchant ce que tu nous fait partager là, et c’est quelque chose qui a une vraie résonance en moi! J’ai perdu mon grand-père voilà maintenant un an et demi, alors que j’habitais au Québec pour mes études et mon stage de fin d’études. Il est décédé 15 jours avant mon retour définitif et c’est dans ces moments là que l’on sent vraiment qu’un océan nous sépare!
    Merci à toi!

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